Présentée sous l’impulsion du ministre Lametti à la demande de la juge québécoise Christine Baudouin, la loi C-7 représente une avancée réelle. En effet, C-14, la loi précédente, imposait la notion de « mort raisonnablement prévisible » : ce critère rendait inaccessible l’aide médicale à mourir (AMM) à de nombreux citoyens. C-7 vient donc élargir l’accès à l’aide médicale à mourir.
Cet élargissement était une demande largement réitérée par l’AQDMD, qui s’est impliquée dans le dossier depuis le départ, notamment lors du procès Truchon et Gladu au cours duquel la Juge Baudouin a jugé la disposition inconstitutionnelle. « Nous sommes heureux que le Sénat canadien, à une forte majorité, ait entériné la proposition gouvernementale après avoir proposé des éléments de bonification très pertinents », se réjouit le Dr Georges L’Espérance, Président de l’Association et lui-même praticien de l’AMM. « C7 n’est pas parfaite, mais permet d’avancer encore plus dans le processus d’une fin de vie dans la dignité, comme le demande la majeure partie de la population. »
Plus spécifiquement, L’AQDMD soutient l’apport de deux régimes par C-7 : désormais soit la mort naturelle est raisonnablement prévisible à court ou moyen terme, soit elle ne l’est pas. Dans le premier cas, la patient n’a plus à se soumettre à une délai de 10 jours et il peut avoir recours à une clause de renonciation (article 3.2) en cas de perte d’aptitude : « C’est une avancée humanitaire qui répond aux constats cliniques », poursuit le Dr L’Espérance.
Dans le cas où la mort naturelle n’est pas raisonnablement prévisible à moyen terme et que la personne rencontre tous les autres critères, un délai de 90 jours de réflexion pour le patient est mis en place. « Ainsi, un patient dont la mort naturelle n’est pas raisonnablement prévisible, c’est-à-dire n’arrivera certainement pas dans les prochains mois, peut malgré tout accéder à l’AMM s’il le souhaite et s’il remplit les autres critères. Cela vaut par exemple pour les cas de lésions médullaires entraînant une quadriplégie, comme c’était le cas dans la situation de M. Truchon », explique Georges L’Espérance.
Les patients avec des maladies chroniques qui les conduiront vers un décès certain (par exemple : sclérose en plaques, sclérose latérale amyotrophique, etc.) n’auront plus à se rendre en Cour pour faire entendre leur voix.
Directives médicales anticipées, santé mentale, mineurs matures : des réflexions à mener
Le gouvernement a prévu dans la loi la mise en route d’une réflexion active sur l’AMM, ce dont l’AQDMD est très satisfaite.
Ainsi, un débat sur les directives médicales anticipées pour les personnes touchées par une maladie neurodégénérative cognitive (telles que Parkinson ou Alzheimer) devra avoir lieu dans l’année 2021. Avec C-7, ces maladies, dont la cause est physique et non psychique, sont admissibles si le patient demande l’AMM alors qu’il a toute son aptitude. Par contre, il ne peut demander l’AMM pour le futur, lorsque la maladie lui aura fait perdre ses capacités. « Il s’agit désormais de reconnaître les directives médicales anticipées pour permettre aux personnes touchées par une maladie neurodégénérative cognitive de décider de leur fin de vie en avance, et sans se précipiter parce qu’il risque, légalement, d’être trop tard par la suite », défend Georges L’Espérance.
Un échéancier d’au maximum 24 mois pour les patients aux prises avec une problématique de santé mentale est imposé. « Exclure la santé mentale est anticonstitutionnel, parce que discriminatoire, mais il faut poser des balises cliniques et légales claires et ce délai de réflexion limité dans le temps est pertinent », considère-t-il.
Enfin, « il faudra aborder la question des mineurs matures », soulève le Président de l’AQDMD. La loi C-14 obligeait en effet le gouvernement à se pencher sur cette question en 2021.
Tous ces sujets méritent des discussions approfondies et l’AQDMD participera activement à ces réflexions dans les prochains mois.